Février 2005

Depuis quelques années, nous savons que les premiers céladons datent de la période allant du ler siècle au IVème siècle avant Jésus-Christ, et ce grâce à la découverte de céramiques de ce type déterrées dans le site du four de Hongzhou à Fengcheng, région protégée par l’état Chinois.

Cependant, la qualité des céladons atteignit son apogée sous la dynastie Chinoise des SONG (960-1279). Il existait alors cinq grands fours de cuisson de porcelaine, le four « RU » étant connu pour ses céladons et le four « GE » pour ses céladons craquelés .

On nomme « ru » un type de porcelaines monochromes provenant du four du même nom. Les plus belles productions étaient destinées à l’usage exclusif de la Cour, et ces pièces sont les plus recherchées des collectionneurs. Elles atteignent des sommes faramineuses parce qu’elles correspondent parfaitement à l’esprit esthétique impérial chinois par leurs lignes sobres et épurées et leur couleur qui rappelle le jade. Les « ru » sont rarissimes.

On pense que ces pièces étaient destinées uniquement à la contemplation ; dans la plupart des cas, elles ne comportaient aucun décor.

Les céladons « SONG » sont souvent ornés de dessins gravés, ou de motifs incisés ou en relief réalisés à l’aide d’un couteau de bambou. Le dessous de ces pièces est également couvert de glaçure à l’exception d’un cercle ou d’un anneau dépourvu de couverte et dont la pâte a pris une teinte rouge de rouille à cause de la présence de fer dans du kaolin impur. Cela est un des signes prouvant l’authenticité de ces pièces.

Deux des artisans réputés ayant travaillé sous l’époque SONG sont les frères Chang (Xllème siècle) qui réalisèrent des céladons non craquelés appelés « Chang Yao » et craquelés appelés « Ko Yao ».

Aux débuts, ce furent d’abord des grès ou protocéladons (1), et des protoporcelaines (2) qui furent fabriqués. Ensuite vint la découverte du kaolin qui permit de les réaliser en porcelaine et dont la fabrication fut longtemps restée secrète. Le kaolin, qui signifie « haute colline » en chinois, est l’élément de base de la porcelaine (55%). C’est une argile plastique très pure et très blanche.

Il est communément admis que la découverte du Kaolin s’est faite en Chine sous l’époque des TANG (618-907) (3).

Mais qu’est-ce qu’un céladon ?

Il s’agit de toutes sortes de pièces de formes, vases, bols, objets de la vie courante ou religieuse (représentations de divinités) en porcelaine recouverte d’émail ou d’émail craquelé monochrome. Leur couleur va du bleu-pâle au vert-olive. Elle est obtenue par l’application d’une couverte bleutée sur de l’argile jaunâtre. Les différentes nuances de couleurs dépendaient de la quantité de fer contenue dans l’argile. Ces pièces étaient ensuite cuites en atmosphère réductrice(4) entre 1200° et 1280° pour la plupart.

Le nom « céladon » a été donné en 1617 par les dames de la cour de Louis XIII en référence au nom du héros du roman pastoral de près de 5.000 pages d’Honoré d’Urfé (l’Astrée,1607). Céladon était le berger dont le costume était toujours agrémenté de rubans verts et qui après de nombreuses péripéties, se retira dans un bois de chêne pour y élever un temple de verdure en hommage à la déesse Astrée.

Les Coréens fabriquèrent de superbes céladons sous la dynastie KORYO (918-1392). La technique de fabrication leur fut connue grâce aux Chinois. À la fin du XVlème siècle, les japonais envahirent la Corée et découvrirent à leur tour, grâce à Ri Sanpei (potier captif des japonais ramené dans leur pays) les techniques de la porcelaine et du céladon.

Ri Sanpei explora les collines avoisinant le village de Nishitaka et finit par découvrir du kaolin à Izumiyama, en haut de la rivière Arita proche du village du même nom et qui devint plus tard un important centre porcelainier. Les premières véritables porcelaines japonaises datent donc du début du XVllème siècle .

On doit citer le premier potier de la célèbre dynastie des « Kakiemon » qui donnèrent leur nom à un type de décor particulier : il s’agit de Sakaida Kakiemon (5) qui réalisa des céladons en suivant l’exemple coréen.

C’est véritablement à partir de 1800 que les céladons furent fabriqués au Japon, principalement dans les villes de San-0 et Set-Gsu.

En Thaïlande, des principaux centres de production que furent Sukhotai et Chiang Mai, on connaît surtout des céladons allant du brun au bleu cobalt.

Le succès de ces pièces fut tel qu’elles furent exportées vers l’Europe, mais également vers l’Inde et les pays musulmans. On sait d’ailleurs que les Mahométans attribuaient des vertus magiques aux céladons.

Les céladons des XVlllème et XIXème siècles sont plus légers que leurs prédécesseurs. En Europe, ils furent souvent associés à des montures en bronze doré qui leur fournissait une protection en même temps qu’une nouvelle approche esthétique tout occidentale : aux subtiles nuances des couleurs orientales se mariait le contraste ostentatoire des plus belles créations des bronziers européens.

La fabrique royale danoise de Copenhague produisit dans les années 1930 de très belles pièces en céladon et céladon craquelé.

Toutes ces pièces ne sont pas courantes et donc fort recherchées des amateurs. Différencier les différentes époques de création des céladons anciens est affaire de spécialiste.

Vivian Miessen

 

(1) Grès à couverte variant du jaune au bleu-vert.

(2) Possède diverses propriétés de la porcelaine, mais d’une qualité inférieure.

(3) Selon certaines sources, à l’époque des dynasties du nord (386-581), on réussit à cuire du Kaolin et à obtenir une porcelaine blanche comme neige.

(4) Le manque d’oxygène pendant la cuisson a pour effet de donner des couleurs plus claires.

(5) Dont la descendance travaille encore de nos jours.